Etrange concert en ce vendredi soir d'octobre : AS Dragon, Programme, et Chokebore, soit la réunion de trois groupes qui ont en commun si peu de choses que ce concert se rapproche plus d'un mini-festival que d'un concert "ordinaire". Les craintes dues à l'hétérogénité des concerts a été malheureusement vite confirmée : le concert d'AS Dragon fut très bon, mais le public aussi clairsemé que peu réceptif a boudé la prestation du groupe, ex-backing band du label Tricatel. Les déhanchements de la chanteuse et la qualité intrinsèque du groupe n'y ont rien changé : dommage, mais on ne doute pas que le groupe fera plus tard un malheur.

A peine les dernières notes d'AS Dragon dissipées et c'est Programme qui surgit. Précédé d'une réputation mitigée concernant leurs prestations scéniques (les tomates ou les louanges, au choix) le duo toulousain livra une prestation mémorable. Certes, si la musique est très proche de celle du disque, c'est véritablemnt sur scène, visuellement que se produit le choc : avec de rares lumières, trois micros, un ordinateur, une guitare, Programme réussit à faire voler en éclat la Cigale qui passait par là. Entamant leur set avec le morceau d'ouverture du dernier album, "Il y a" et son vrombissement unique, Programme a réussit à montrer qu'il était un groupe aussi passionnant sur scène que sur disque. De "Demain" à "Une vie", de "La salle de jeux et la peur" à "Je sais où je vais", le groupe réussit tout ce qu'il touche et même à faire avaler les pillules les plus amères au public cette fois-ci bien présent : "N'importe quoi" assez faible sur disque prend une toute autre dimension lorsque Damien Bétous s'empare de la guitare. Et lorsque Arnaud Michniak entame une "danse" improbable avec son ombre, c'est tout le public qui sombre. Programme sur scène est une expérience unique pour ceux qui ont jetés une oreille sur leur disque. Pas un merci pas un au revoir - mais au fond est-ce bien étonnant ? - de la part d'Arnaud Michniak, mais un petit signe de main timide de Damien Bétous met fin au concert qui décidément marquera les esprits.

Puis vînt le groupe que tout le monde ou presque attendait : Chokebore. Et comme à son habitude, un concert en tout point excellent même si la rage semble un peu moins présente. Entrant sur scène sur "The Rest of Your Evening" (version suédoise), le groupe acclamé sait au moins qu'il aura encore le public dans la poche. Un seul petit inédit à se mettre sous la dent, le reste du set étant constitué à 50% de titres de leur dernier album "It's a Miracle", dont un "She Flew Alone" en ouverture qui résume Chokebore à lui tout seul : un versant calme et apaisé qui laisse rapidement place au côté sombre et agressif de leur musique. Le sublime "Police" tiré de leur dernier album alterne avec "Smaller Steps" datant d'il y a 4 ans maintenant et met les pendules à l'heure une bone fois pour toutes : Chokebore est sur scène un monstre d'efficacité, de puissance et de mélancolie. Loin d'être le meilleur groupe du monde sur disque, Chokebore n'est pas loin d'être ce qu'il se fait de mieux en live dans la catégorie des formations rock classiques. Et c'est le déplorable couvre-feu qui porte bien son nom (déplorable pour nous, mais heureux pour le voisinage de la Cigale, il existe à Paris un couvre-feu qui empêche certaines salles de jouer après 22h30, ce qui fait que les concerts comme ici commencent trois quart d'heure après l'heure initiale, mais par contre se terminent 5 minutes après l'heure du couvre-feu.) qui met fin à cette soirée inoubliable. Une affiche hétéroclite mais un sentiment unique : celui d'avoir passé un très bon moment en compagnie de ces trois groupes.

Arnaud G.
Millefeuille