Nous t'avons découvert avec Shadow Project puis Daucus Karota. Comment t'es- tu retrouvé impliqué dans ces projets ?

Christian O Madrigal : tout a commencé au Rose Bowl à Pasadena (Californie, USA) en avril 1992 durant le festival « Earth Day ». Eva O était là pour voir son ami Ace Farren Ford qui devait jouer avec son groupe The Mistery Band. Moi j'étais avec Brian Carlson d'EXP et Evil Ed, le technicien de Shadow Project.
Nous avions une rencontre entre batteurs au même endroit. J'étais endormi sur la pelouse et tout ce dont je me rappelle c'est qu'Evil Ed m'a réveillé et qu'il était complètement hystérique en me disant : « je viens de rencontrer Eva O, l'épouse de Rozz Williams, elle est juste en face et voudrait fumer » et c'est comme ça que tout a commencé, on a fumé, on a parlé.
Ed et moi étions fan de la première heure, j'ai assisté au premier concert de Shadow Project à Los Angeles. Avant de quitter Eva O je lui ai dit que s'ils avaient besoin d'un batteur, ils pouvaient faire appel à moi, et 8 mois plus tard je recevais un message de Rozz me disant qu'il avait besoin d'un batteur pour enregistrer « The Path of Sorrows » (Christian Death 1993) mais je devais à cette époque partir en tournée avec mon groupe Pay The Man. C'est la raison pour laquelle je n'ai joué que sur un seul titre (« Easter (in the tomb) ») même si je regrettais de ne pouvoir en faire plus.
Après je voulais aller à tous leurs concerts à Los Angeles pour les soutenir. C'est alors qu'Eva O a commencé à se produire en solo avec son groupe composé du bassiste Dave Roberts (Sex Gang Children), je devais alors jouer exclusivement avec eux. C'est après le départ du batteur de Shadow Project que je suis vraiment rentré dans le groupe.
Après la tournée américaine « Dreams for the Dying » en juillet 93, Shadow Project s'est arrêté quand Paris s'est joint à Eva O pour travailler sur son album solo. Tandis que Marc Barone (basse) et moi-même partions avec Rozz en Allemagne pour deux semaines. La tournée était toujours sous le nom de Shadow Project mais en fait il s'agissait de Daucus Karota et de fait quand nous sommes revenus à Los Angeles nous avons enregistré le seul album produit sous le nom de Daucus Karota « Shrine ».

Cela reste une bonne expérience ?

Oui ce fut une très bonne expérience et même si j'avais déjà tourné avec d'autres groupes par le passé, avant de rejoindre Shadow Project, c'était particulièrement fun de jouer avec un groupe dont j'étais et suis toujours d'ailleurs, fan. De plus Rozz est le mec le plus délirant avec lequel j'ai travaillé, il était très drôle et plaisantait sans arrêt. En plus les morceaux de Shadow Project étaient compliqués à jouer, cela constituait pour moi un bon entraînement. J'avais tout juste 19 ans quand j'ai rejoint Shadow Project et c'était plus une famille pour moi.

Tu étais dans le premier line-up d'EXP. Pourquoi avoir quitté le groupe pendant un moment ? Qu'as tu fais pendant ce temps là ?

Je n'étais pas dans la première formation d'EXP parce qu'il n'y a jamais eu de formation fixe, nous jouions au jour le jour et c'est ce qui fait la beauté du groupe.
La raison pour laquelle j'ai quitté EXP réside dans le fait d'avoir trop longtemps joué ensemble, et nous étions tous très têtus.
C'est comme ça que j'ai rejoint Chokebore avec qui je fais une musique différente, nous enregistrions et tournions beaucoup en Europe.

Tu es de retour au sein d'EXP, travailles tu sur de nouvelles compositions ?

Oui, Paris et moi sommes en train de terminer un album riche en nouveaux enregistrements que nous projetons de produire jusqu'à un certain point.
Sinon j'ai actuellement de vieux morceaux d'EXP réunis sur un CD « 1994 » qui est en vente, les personnes intéressées peuvent m'envoyer un message via notre e-mail : bisende@yahoo.com.

Quel est le line-up actuel ?

EXP est composé de Paris et moi-même. Paris doit d'ailleurs repartir pour Berlin où il va bientôt être papa. Nous projetons de continuer ensemble au niveau musical par courrier.

Les dernières productions d'EXP (7″ single et « 1994 » CD) sont des auto-productions. T'en as ras le bol de l'industrie musicale ?

Je suis vraiment lassé de l'industrie musicale. Je trouve plus gratifiant de presser 10 CD à la fois en le faisant toi-même, plutôt que de laisser un label en fabriquer 5 000 et ne jamais voir le moindre sou. Les labels étaient une nécessité avant l'ère des ordinateurs, de la distribution on-line. Les labels espèrent que les albums vont sortir des rayons, faire du porte à porte et se vendre tout seul. Ils oublient une chose qui s'appelle la promotion.

I Love Happy Records est votre propre label ?

Oui, c'est le résultat de ma frustration concernant l'industrie musicale. J'ai commencé quand j'ai mis en vente sur rozznet 15 exemplaires de « Headbag », le premier 7″ d'EXP. Les réponses des fans m'ont donné l'idée d'I Love Happy Records. Et maintenant au lieu que l'argent aille à une maison de disque, il va où il doit aller, c'est à dire à nous. Avec ce premier 7″ c'est la première fois en 10 ans et après une quinzaine d'enregistrements que je vois un dollar. Et cet enregistrement, Paris et moi l'avons payé avec notre propre argent.

Experimentation without limitation est votre devise ?

C'est une citation de Paris. Il l'avait utilisé pour une vieille biographie d'EXP. Nous sommes ouvert à tout.

Es-tu impliqué dans d'autres groupes ?

Oui, je suis actuellement avec un groupe qui s'appelle Chokebore. Nous sommes en train de réaliser un nouvel album et nous allons tourner en Europe et jouer dans un festival au Japon. Je joue aussi dans un groupe local Trillion Stars. Dans un projet parallèle, Paris, notre ami Mitch et moi avons commencé à enregistrer sous le nom d'Audio Children. Pour ce projet nous utilisons des instruments de musique pour enfants. Je joue aussi dans le projet solo de Mitch. Je projette de sortir Audio Children sur I Love Happy Records.

Peux tu nous parler de Bis Ende ?

J' ai commencé Bis Ende quand j'ai quitté Chokebore pour la première fois en 1996. J'avais acheté un sampleur et commencé les enregistrements. Le fait d'avoir samplé ma batterie me permettait de jouer de la basse et d'écrire les morceaux moi-même. Un soir chez Rozz alors que Gitane était présente, je leur ai fait écouter ma cassette. Gitane était intéressée et m'a demandé si je voulais du chant sur ces morceaux. Evidement j'ai accepté et voilà comment à débuté notre collaboration.

Qu'est ce qui t'inspire, t'influence ?

Tout ce qui m'arrive dans ma vie m'influence. le reste de mon inspiration est due à l'herbe sacrée.

A propos de tes goûts, quels sont tes groupes, films, auteurs préférés ?

Black Sabbath, Jimi Hendrix, Tortoise, Kurt Cobain, Rozz Williams, Bob Marley, Peter Tosh, Bauhaus, Yind pour la Suède, Lowercase, Tocotronic pour n'en citer que quelques uns.
Je ne suis pas un grand lecteur mais j'aime énormément Rod Serling. J'aime les masques de lutte mexicaine qui ont été utilisés au cinéma. J'aime les films d'El Santo, Blue Demon, Mil Mascaras. Je suis également un gros fan de Bela Lugosi, Lon Chaney et Boris Karloff, aussi les Godzilla et les films avec des robots géant. Ainsi que les films avec Toshiro Mifune.

Est ce que tu apprécie un certain style de techno ?

Je n'ai jamais aimé la musique de club, mais j'aime vraiment Aphex Twin, Future Sound Of London, Deep Forest, Tricky, Massive Attack, The Residents, et Björk.

Que pense tu de la scène underground actuelle ?

En ce moment je me concentre sur la musique locale. J'ai été par le passé éloigné de cette scène. Mais aujourd'hui je m'intéresse plus particulièrement à la LUCHA LIBRE (lutte mexicaine). Après 10 ans j'avais envie de faire un petit break au niveau musical et la LUCHA LIBRE m'amuse beaucoup. Pour moi la scène underground sera toujours la forme la plus pure au niveau musical et ce aussi longtemps que les groupes qui la composent ne courent pas après un contrat.

Peut on espérer voir EXP en concert en Europe ?

Je pense que Paris a des contacts pour jouer à Berlin et dans des villes voisines, dans un futur proche.

Pour finir, quelques mots sur la LUCHA LIBRE ?

La LUCHA LIBRE est une forme de lutte qui a vu le jour à Mexico il y a 50 ans de ça. La différence c'est l'utilisation de masques pour que les lutteurs puissent dissimuler leur identité. En fait il s'agit plus d'une performance artistique que d'un sport, aussi doivent ils rester en bonne forme physique et athlétique. Je les vois plus comme des artistes. Le catch américain c'est plus les regarder s'engueuler entre eux devant un micro. Au Japon ce n'est que violence. Je préfère la lutte mexicaine déjà au niveau visuel, c'est plus coloré, et conceptuellement parlant plus créatif. Ils vivent, respirent, ce sont des super héros, comme Spider Man, Batman etc. et en plus j'adore les masques. Je possède beaucoup de films avec des catcheurs mexicains ainsi que des combats de lucha libre en vidéo, si certains sont intéressés, qu'ils m'envoient un e-mail. Pour ceux qui veulent voir des photos de Bis Ende visitez notre site : members.tripod.com/bisende/, et aussi chokebore.net, chokebore.com.

David Del Rosario
Tragic Media #4
novembre 2000